Paludisme Méfiance et protection absolument nécessaire

S’il y a bien une maladie sur laquelle je crois bon d’insister, c’est le paludisme, connu par nos amis anglophones sous le nom de malaria.

Peut-être simplement parce que je l’ai rapporté deux fois dans mes bagages, et qu’à chaque fois j’ai cru que mon heure était venue. Aussi parce que trop souvent, j’ai eu écho d’un voyageur n’étant simplement pas rentré vivant d’une escapade à l’étranger. J’ai par ailleurs toujours eu envie de m’y intéresser, et je n’ai jamais manqué de beaucoup lire sur le sujet.

Je vous propose donc (avec l’aide des sources citées en bas) une présentation générale du paludisme. L’idée est de vous permettre d’en savoir plus sur cette maladie, comme bien sûr de connaître les meilleurs moyens de la prévenir.

Après quelques faits, je vais évoquer ici les moustiques vecteurs du paludisme et la transmission. Puis, je vous présenterai les symptômes, et les différentes modes de prévention.

Attention, cet article ne saurait en aucun cas se soustraire à une prescription ou aux conseils avisés de votre médecin, ou à ceux d’un centre de vaccination.

Pour commencer quelques faits :

  • 3,2 milliards de personnes vivent dans des régions où le risque de transmission du paludisme est fort.
  • La maladie sévit encore dans 96 pays
  • L’Organisation Mondiale de la Santé estime qu’en 2015, le paludisme a causé 212 millions de cas, dont 429 000 décès.
  • En 2015, 90% des cas de paludisme et 92% des décès dus à cette maladie sont survenus en Afrique Sub-Saharienne.
  • Si le nombre de nouveaux cas a baissé entre 2010 et 2015 de 21% au niveau mondial avec un recul de la mortalité de 29%, le paludisme reste une maladie potentiellement mortelle.

Ce qui nous rend si attractifs auprès des moustiques, c’est le dioxyde de carbone que nous émettons, en respirant ou en transpirant. Ils peuvent le détecter à une trentaine de mètres de distance. Alors inutile d’éteindre la lumière !

Et des moustiques, il en existe 3600 espèces…

…présents partout sur notre planète, à l’exception des régions arctiques et antarctiques.

Les moustiques appartiennent au grand ordre des Diptères dont la caractéristique principale est de posséder deux ailes. Parmi les Diptères, focalisons-nous sur la famille des Culicidae dont deux sous-familles nous intéressent en santé humaine : les Culicinae avec deux genres importants : le genre Culex et le genre Aedes. Les Anophelinae avec surtout le genre Anopheles. Ces trois genres peuvent véhiculer des parasites comme les filaires (des vers sanguins) et des arbovirus (virus ayant pour origine un arthropode). Seuls les anophèles (il en existe 500 espèces) peuvent transmettre le Plasmodium, redoutable parasite responsable du paludisme.

Les adultes, mâles surtout et femelles, se nourrissent de nectar floraux ou autres substances sucrées. Pour la femelle un repas de sang est nécessaire pour la maturation des oeufs ; ce sont des repas gonotrophiques, c’est-à-dire qu’un repas engendre une ponte. Ce sont donc seulement les femelles qui piquent, on voit bien là que leur intention n’est pas de nous nuire, mais d’assurer la pérennité de l’espèce. Certains moustiques peuvent avoir une première ponte sans repas de sang grâce aux réserves accumulées au stade larvaire ; on appelle ce phénomène « autogénie » mais il est rare chez les anophèles. La femelle passe environ trois minutes à nous pomper le sang, si elle n’est pas dérangée, ce qui est souvent le cas tant la piqure est indolore.

Après son repas de sang, la femelle cherche un lieu de repos pour la digestion et pour la maturation des oeufs – comme les plafonds des habitations, les armoires et les meubles, les buissons. Ensuite, la ponte sera effectuée à la surface de l’eau d’un site propice. Les anophèles affectionnent les eaux douces et claires, comme les mares, les rizières, les bords de rivières et de fleuves mais certaines espèces sont adaptées aux eaux saumâtres.

Tray and pans in outdoors stores stagnant water and breeding ground for mosquito
L’eau douce, claire et stagnante, idéale pour une ponte

Pour terminer le cycle gonotrophique la femelle pond plus d’une centaine d’oeufs puis part en quête d’un nouveau repas de sang… point de départ du cycle suivant. La durée d’un cycle gonotrophique est de 48 à 72h. Ce phénomène se répète durant un mois, duré de vie moyenne de l’anophèle.

Une caractéristique qui permet de distinguer l’anophèle des autres genres de moustiques, est qu’en position de repos sur un support, les Anophèles maintiennent leur corps à l’oblique alors que les autres moustiques se tiennent parallèle à la surface.

Les Anophèles sont des moustiques furtifs, silencieux et dont la piqûre est indolore même si la réaction qui s’ensuit peut être sévère selon les personnes. La localisation des piqûres sur le corps peut être spécifique de certaines espèces. Par exemple Anopheles gambiae aime bien piquer au niveau des chevilles. Et ça, si vous avez déjà voyagé en Afrique Sub-Saharienne, vous en avez fait les frais.

Un fléau de santé publique

Pour l’Afrique, le paludisme représente un fléau de santé publique, dont la gravité n’a pas d’égal sur la planète puisque ce continent regroupe plus de 88 % des cas enregistrés dans le monde. La principale raison est que les vecteurs africains sont les plus efficaces ! Il est important cependant de garder en mémoire que ce fléau mortel est également présent en Amérique et en Asie, en particulier dans les zones forestières.

L’OMS précise aussi que la transmission est plus intense aux endroits où les espèces de moustiques ont une durée de vie relativement longue (ce qui permet au parasite d’achever son cycle de développement à l’intérieur du moustique) et piquent plutôt les êtres humains que les animaux. La longue durée de vie et la forte préférence pour l’homme des espèces africaines de vecteurs expliquent que près de 90% des cas de paludisme surviennent en Afrique. »

Afrique
Femmes d’un village en Zambie, où le paludisme sévit aussi fortement / © Renaud Fulconis – DPST

Mais alors, pourquoi seules les anophèles peuvent transmettre le parasite Plasmodium ? Et là, cela devient vraiment intéressant !

Des données récentes nous mettent sur une piste qui peut, peut être, nous éclairer sur ce sujet. Le Professeur Lazzari de l’université de Tours a très bien étudié le mécanisme de régulation de la température chez les insectes hématophages à l’aide d’une caméra thermique. Normalement, un insecte hématophage a une température de corps égale environ à la température ambiante. L’absorption d’un repas de sang à 37°C devrait provoquer un choc thermique et tuer cet insecte.

Chez les anophèles, lors de l’absorption du repas, généralement assez long, le moustique émet une gouttelette de sang à l’extrémité de l’abdomen. La position en oblique du corps de l’anophèle facilite le maintien en suspension de la gouttelette de sang qui prend alors la température ambiante et ainsi se refroidit.

Par conduction et évaporation, la gouttelette refroidit alors l’abdomen du moustique. On sait que les différentes espèces de plasmodium sont thermo-sensibles, la température a un impact sur la période d’incubation du parasite dans le moustique. Ceci pourrait constituer une des explications à l’association Anophèle/Plasmodium puisque ce phénomène de régulation protège du stress thermique le moustique, mais aussi les micro-organismes associés dont le parasite.

Symptômes

Pour commencer par parler de mon expérience, ma première crise de paludisme s’est déclarée peu après un retour de Guyane française. C’était au cours d’une nuit pleine de cauchemars.

Je me suis réveillé avec une forte fièvre et des nausées tout aussi fortes que désagréables. J’étais couché, mais me souviens parfaitement de l’intense état de faiblesse dans lequel je baignais.

La seconde fois, j’étais au volant, et fort de mon expérience précédente, j’ai supposé immédiatement ce dont il s’agissait lorsque les premiers symptômes sont apparus. Une fois encore, une extrême fatigue, des frissons, des maux de têtes et une fièvre intense. Je revenais alors du Cameroun.

Ainsi, chez les personnes ne prenant aucun traitement, ces symptômes apparaissent à partir du 7e jour après la piqure d’un moustique, plus souvent au bout de 10 à 15 jours. Il est difficile de les attribuer au paludisme avec certitude. La première fois d’ailleurs, mon médecin généraliste avait, malgré la connaissance de mon retour récent d’une zone impaludée, diagnostiqué une rhino-pharyngite. Si c’est votre cas et dans le doute, faites-vous faire un frottis sanguin ou une goutte épaisse permettant d’affirmer ou d’infirmer qu’il s’agit bien de paludisme et dans le cas positif, d’en déterminer l’espèce. En effet, dans le cas du paludisme à Plasmodium falciparum (celui que j’ai eu à deux reprises), une absence de traitement dans les 24 heures peut évoluer vers une affection sévère, et souvent mortelle.

Dans le premier cas, j’avais passé une semaine sous perfusion au service des maladies tropicale du CHR d’Orléans. J’étais si faible que je tenais à peine debout, et je suis ressorti avec 5 ou 6 kilos de moins. Lors de mon second palu, j’étais alors en Belgique où une fois correctement diagnostiqué par une goutte épaisse, j’ai été renvoyé chez moi avec le traitement médicamenteux.

S’EN PREVENIR DURANT LE VOYAGE

Traitement préventif

Si vous vous rendez dans une zone impaludée, il me semble important de répéter qu’une visite préalable à votre médecin s’impose. Il pourra alors vous prescrire la chimioprophylaxie la plus adaptée. Respectez scrupuleusement la posologie. Et si celle-ci vous invite à poursuivre le traitement une semaine après le retour (logique puisque les symptômes peuvent se déclarer plus de sept jours après la piqure), alors faites-le bien. Les différents types de traitements préventifs sont détaillés sur le site de l’Institut Pasteur.

Vêtements longs

Voici une méthode simple de se prévenir des piqures. Avant le coucher du soleil, troquez votre short et votre t-shirt pour un pantalon et une chemise ou un t-shirt à manches longues. C’est mieux encore si vous avez préalablement imprégné ces vêtements d’insecticide en spray.

Répulsifs

Chez nous, on fait parfois brûler une bougie à la citronnelle. À l’étranger, utiliser un spray sur la peau découverte avant le cocher du soleil également est un moyen supplémentaire de prévenir les piqures.

Mosquito repellent. Woman spraying insect repellent on skin outdoor in nature using spray bottle.
L’utilisation d’un spray anti-moustique est une des solutions, mais elle est insuffisante en zone impaludée

Moustiquaires

Dormir sous une moustiquaire elle aussi imprégnée d’une solution répulsive est une solution de plus. Elle vous permettra par ailleurs de mieux dormir, tant le bzz émis par les moustiques peut être à la longue insoutenable. Il est pour les insectes, dû au battement rapide de leurs ailes (400 à 3200 battements par seconde). Pour les moustiques femelles, c’est un moyen d’attirer les mâles.

Mosquito net
La moustiquaire est incontournable en zone de présence des moustiques, comme ici en forêt d’Afrique centrale

Pour revenir à la moustiquaire, il faut bien sûr qu’elle soit en bon état, sans le moindre trou. Attention cependant ! Depuis la généralisation des moustiquaires, en particulier grâce aux programmes de prévention des organisations internationales, les moustiques ont adapté leur comportement et dans de nombreuses régions, se sont mis à piquer plus tôt et avant le coucher du soleil.

Alors voilà, vous êtes maintenant bien informés sur cette maladie et les moyens de vous en prévenir. N’hésitez pas à partager cet article avec celles et ceux de votre entourage qui partent bientôt dans une zone impaludée.

Pour aller plus loin :
. Ce film de l’INSERM, « Grandes tueuses, le paludisme »

Sources : 
. Pr Jean-Michel Bérenger, Institut Hospitalo-Universitaire Méditerranée Infection à Marseille – Université Aix-Marseille
. Organisation Mondiale pour la Santé

 

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